>> Électrochoc.

À celles que j'ai manquées, si peu nombreuses, mais finalement si précieuses.
À celles qui m'ont superbement ignoré, et qui m'ont inévitablement fait souffrir.
Aux mains que j'aurais dû saisir, et que j'ai pourtant laissé filer telles du sable, fichue poussière de coquillages.
Aux occasions que j'ai essayé de ne pas manquer, mais qui m'ont tellement déçu, finalement.
Aux soirées passées la tête entre les mains, à me lamenter tout en espérant que mes amours déçues ne le resteraient plus si longtemps, en vain.

Beigbeder, dans Un Roman Français, souligne avec justesse l'évidence-même, en enfonçant cette porte ouverte : on n'aime finalement que celles que l'on sait inaccessibles, inabordables. Les "restons bons amis", les "non, ce n'est pas à toi que je souriais, de loin", les "avec ton charme naturel, tu devrais en faire craquer plus d'une, rassure-toi", toutes celles qui ont élevé au rang de préciosité littéraire l'art d'éconduire un crapaud mort d'amour.
Mais, j'y viens bien tard, depuis plus de dix-huit ans que je suis là et que je pense, il est clair que j'aurais sans doute dû tenter d'exprimer bruyamment toute la désuétude de mes sentiments.
Oui, je vous aime, vous que j'ai croisées dans la rue, dans un bus, un train, quelque part dans quelque ville au cours d'un périple, dans une soirée. J'aime sans que cela se remarque, et pourtant...

Oui, je t'aime, toi qui auras su briser mon coeur une soirée d'automne en restant plantée devant une jarre pleine de fraises Tagada.
Oui, je t'aime, toi qui as chamboulé toutes mes certitudes, un été plein de contradictions et d'herbe coupée, et qui m'as fait voir les choses d'une façon tout à fait différente.
Oui, je t'aime, toi que j'écoutais et qui m'écoutais et qui désormais vagabondes de conquêtes en conquêtes, comme un avion avide d'ailes sans cesse nouvelles.
Planant à travers passé pas si simple, futur antérieur et présent du conditionnel, je reprends mon vieil alto et je désaccorde.

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[Vanessa]

:)